ANALYSE D'ARTICLE

Composés perfluoroalkylés et santé reproductive masculine :
est-ce que le PFOA et le PFOS
augmentent le risque d’infertilité ?

L’acide perfluoro-octanoïque (PFOA) et l’acide perfluoro-octane-sulfonique (PFOS) de la famille de substance alkyls per- et polyfluorés, ou PFAS, constituent un vaste groupe de composés largement utilisés depuis les années 1950 dans l’industrie pour traiter les produits manufacturés du quotidien et accroître leur résistance aux processus de dégradation. Les études épidémiologiques ont montré un probable accroissement du risque pour de nombreux effets sanitaires (maladie thyroïdienne, taux de cholestérol élevé, cancer du rein, des testicules et de la prostate, immunotoxicité, métabolisme, maladie reproductive, etc.) associé à l’exposition à ces substances. Le poids des preuves déterminant la plausibilité des hypothèses étiologiques varie en fonction de la spécificité des propriétés physicochimiques de la substance au sein de sa famille et des effets considérés.

La plupart des études d’imprégnation ont montré une exposition ubiquitaire de la population générale. Les études sur cohorte danoise et japonaise présentent des corrélations entre imprégnation aux PFOS/PFOA des mères participantes et des faibles poids à la naissance de leurs enfants. Le passage transplacentaire mène à des effets toxiques au cours du développement embryonnaire et peut perturber le développement fœtal des organes reproducteurs masculins. Ces expositions pourraient être à l’origine fœtale de la dégradation de l’infertilité de l’adulte notamment par des mécanismes épigénétiques.

Les études épidémiologiques récentes suggèrent des associations entre une augmentation de l’exposition aux PFOA/PFOS, une dégradation des paramètres mesurant la qualité du sperme, et la modification de la concentration d’enzymes stéroïdes clés : estrogène, testostérone, récepteurs testiculaires de la gonadotropine, globuline hormono-liante, hormones de croissance, lutéinisantes et folliculostimulantes, etc. La capacité d’une substance à perturber l’activité endocrinienne dépend de la concentration dans le système biologique. La responsabilité des perturbateurs endocriniens (PE) reste difficile à établir notamment en raison de l’exposition des populations à des mélanges de composés chimiques et des relations dose-réponse non linéaires (ou dites « non monotones ») liées aux mécanismes de rétrocontrôle hormonal, à la désensibilisation des récepteurs et la diminution de leur expression, ou encore à la saturation d’une voie métabolique. Cela explique, en partie, la contradiction des résultats des différentes études et la difficulté de vérifier la plausibilité des relations dose-réponse.

Des associations plus fortes ont été montrées avec des expositions durant des fenêtres de susceptibilité spécifiques, quand les organes sont plus sensibles aux effets hormonaux, avec des résultats plus tangibles pour les biomarqueurs d’effet par rapport à l’analyse directe des maladies comme critère d’effet. Différentes expérimentations in vitro menées chez les rongeurs ont permis de caractériser certains effets et mécanismes d’action des PE sur la fonction reproductrice masculine. Par exemple, des études expérimentales chez le rat avant ou pendant la puberté montrent des associations assez intéressantes entre exposition aux PFAS, niveaux de testostérones, nombre de spermatozoïdes et altération de la spermatogénèse. Les études montrent une modification de la différenciation et de la prolifération des différents types cellulaires du testicule fœtal. Les actions les plus étudiées sont celles qui portent sur les cellules de Sertoli et les cellules de Leydig fœtales qui travaillent ensemble pour soutenir et réguler le développement des cellules germinales dans les spermatozoïdes matures.


Publication analysée :

* Tarapore P, Ouyang B. Perfluoroalkyl chemicals and male reproductive health: Do PFOA and PFOS increase risk for male infertility? Int J Environ Res Public Health 2021 ; 18 : 3794. Doi : 10.3390/ijerph18073794