Contaminants

Micro-organismes et biocontaminants

YearBook 2023

Samuel Monnier, Michel Thibaudon

Réseau national de surveillance aérobiologique (RNSA), Brussieu

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Synthèse publiée le : 29/06/2023

SYNTHÈSE :
Ambroisie : état des lieux de la progression et risques sanitaires potentiels

L’ambroisie (Ambrosia artemisiifolia L.) est une mauvaise herbe invasive pour l’agriculture qui gagne du terrain en France et qui produit des pollens particulièrement allergisants. Dans cet article, nous ne parlerons que de l’espèce Ambrosia artemisiifolia L. (ambroisie à feuille d’armoise) qui est la plus répandue en France.


L’ambroisie est originaire d'Amérique du Nord, où elle est désignée sous le nom de common ragweed ou « herbe à poux ». Elle a été introduite dans le département de l’Allier en 1863. Elle serait arrivée avec un lot de graines de trèfle violet venant probablement de Pennsylvanie. Elle s'est d'abord répandue autour des habitations et le long des cours d'eau, ce qui explique son extension en France sur un axe Loire-Rhône-Saône. Dès la fin du XIXe siècle, son extension est jugée préoccupante et « à surveiller » [1]. Mais c’est seulement dans la seconde moitié du XIXe siècle que son abondance a fortement augmenté dans des habitats perturbés par l’action humaine, comme les cultures (surtout de tournesol), le long des routes, des voies ferrées, dans les vergers, sur les chantiers, dans les carrières, etc.

L’ambroisie est présente dans le monde tout autour du 45parallèle où elle a trouvé des conditions climatiques propices à son développement.

Elle se reconnaît à ses feuilles très découpées, vertes des deux côtés. Ses branches sont ramifiées et velues, et sa tige est plutôt rougeâtre et couverte de poils blancs (figure 1). L’ambroisie n’a pas d’odeur aromatique (contrairement à l’armoise annuelle avec laquelle il est possible de la confondre). La plante a une hauteur de 10 à 150 cm et fait en moyenne 70 cm.

Ambroisie en fleur

Figure 1. Ambroisie en fleur, plante adulte de 1,50 m avec de nombreuses inflorescences matures.

 

Les premiers cas français de pollinose à l'ambroisie ont été rapportés en 1955 dans la région parisienne, puis en 1964, simultanément dans la Nièvre et la région lyonnaise [2]. Depuis lors, la maladie se cantonne essentiellement en Auvergne-Rhône-Alpes, où elle représente un réel problème de santé publique.

Deux chiffres suffisent pour donner une idée du risque sanitaire représenté par l'ambroisie : d'une part, un seul pied de cette plante est capable de produire 2,5 milliards de grains de pollen [3], d'autre part, il n'est pas nécessaire que l'air respiré renferme plus de 5 grains par mètre cube pour provoquer des troubles chez les sujets allergiques [4]. Si l'on ajoute que la forte volatilité de ce pollen lui permet de parcourir de longues distances (parfois supérieures à 100 kilomètres), on conçoit que le risque dépasse largement la stricte aire d'implantation de la plante.

Cette plante invasive et dangereuse pour la santé sévit d’août à septembre, période où elle libère son pollen fortement allergisant. C’est une espèce annuelle qui se renouvelle grâce aux nombreuses graines qu’elle produit. En effet, chaque plant d’ambroisie peut produire jusqu’à 3 000 semences (de mi-septembre à mi-novembre). Les semences, dépourvues de dispositif de dispersion par le vent, ne peuvent être déplacées que par le ruissellement des eaux, le déplacement de terres infestées ou les engins agricoles et de travaux publics, les véhicules et les semelles des chaussures. La prévention de la pollinose à l’ambroisie passe avant tout par l’information et par la lutte. Il faut distinguer la lutte préventive, pour empêcher l’apparition de la plante (par exemple, en mettant en place un couvert végétal), de la lutte curative, pour empêcher l’émission de pollens et réduire les stocks de graines dans les sols (en éliminant l’ambroisie quand elle est présente).

En France, on retrouve aussi l’ambroisie dans d’autres régions moins touchées comme l’Occitanie, la Nouvelle-Aquitaine, la Bourgogne-Franche-Comté, la Provence-Alpes-Côte d’Azur. On observe une accélération de son développement et de son expansion, notamment en raison du changement climatique (figure 2).

Figure 2. Répartition d’Ambrosia artemisiifolia L. en France.

 

L’allergie à l’ambroisie peut se déclencher à tout âge, mais elle survient souvent à l’adolescence et est déclenchée par une exposition répétée. Le nombre de personnes allergiques à l’ambroisie en France augmente d’année en année. Les symptômes allergiques les plus courants chez l’homme sont : rhinite (nez qui démange, qui coule, éternuements), conjonctivite (les yeux sont rouges, gonflés, larmoyants et ils démangent), trachéite (toux sèche), asthme (respiration difficile, parfois très grave chez les personnes sensibles), urticaire et eczéma.

On estime à plus de 40 millions d’euros les dépenses publiques sanitaires annuelles liées à l’allergie à l’ambroisie en Auvergne-Rhône-Alpes (ARS Auvergne-Rhône-Alpes et rapport ANSES « Impacts sanitaires et coûts associés à l’ambroisie à feuilles d’armoise en France » : https://www.anses.fr/fr/system/files/AIR2018SA0088Ra.pdf).

Face à un tel enjeu de santé publique, une plateforme interactive « Signalement Ambroisie » a été lancée en 2014. Elle permet d’impliquer chacun dans la lutte contre l’ambroisie en signalant cette plante invasive où qu’on soit en France via quatre canaux : site internet (www.signalementambroisie.fr) ; application mobile (Signalement Ambroisie) ; mail (contact@signalement-ambroisie.fr) ; téléphone (0 972 376 888). Les signalements effectués sont transmis « en direct » aux référents ambroisie concernés, qui coordonneront les actions de lutte nécessaires pour éliminer l’ambroisie.

La France devrait s’inspirer davantage des mesures prises dans des endroits où le problème est apparu quelques décennies plus tôt, comme au Québec où des études ont été faites pour bien traiter l’ambroisie en bord de route en faisant plusieurs fauches (fauche avant floraison et fauche avant grenaison) [5, 6].

Contenir l'impact de la plante à un niveau supportable nécessite la conjugaison des efforts de tous, au quotidien et dans la continuité des saisons, conformément aux arrêtés préfectoraux qui imposent à chacun de prévenir la présence de plants d'ambroisie et de nettoyer tous les espaces où pousse cette espèce invasive. Le devoir de tous : surveiller, alerter et agir !


Références

[1] Thibaudon M. Histoire de l’ambroisie et de l’allergie au pollen d’ambroisie. Environnement, Risques & Santé 2016 ; 15 : 115-25.

[2] Touraine R, Cornillon J, Poumeyrol B. Pollinose et Ambrosia. La diffusion actuelle d'Ambrosia dans la région lyonnaise. Son rôle dans les maladies par allergie pollinique. Bull Soc Linn Lyon 1966 ; 35 : 279-85.

[3] Déchamp C. Pollinoses dues aux ambroisies. Rev Mal Respir 2013 ; 30 : 316-27.

[4] Déchamp C, Deviller P. La maladie. In : Déchamp C, Méon H, eds. Ambroisies - Polluants biologiques. Lyon : ARPPAM-Édition, 2003.

[5] Makra L, Matyasovszky I, Hufnagel L, Tusnády G. The history of ragweed in the world. Appl Ecol Env Res 2015 ; 13 : 489-512.

[6] Bassett IJ, Crompton CW. The biology of Canadian weeds. 11. Ambrosia artemisiifolia L. and A. psilostachya DC. Can J Plant Sci 1975 ; 55 : 463-76.

Synthèse publiée le : 17/05/2022

SYNTHESE :
La transmission des virus respiratoires
dans les environnements intérieurs

Fabien Squinazi (1)
Evelyne Géhin (2)

1. Médecin biologiste,
Membre du Haut Conseil de la Santé Publique, Paris

2. Professeur des Universités
CERTES Université Paris-Est Créteil, Créteil

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Synthèse publiée le : 12/06/2021

SYNTHÈSE :
Obépine : premier observatoire épidémiologique
des eaux usées en France

Vincent Maréchal (1,3)
Yvon Maday (2,3)
Consortium Obépine (3)

1. Professeur de virologie, Sorbonne Université, Inserm, Centre de recherche Saint-Antoine, 75012 Paris, France
2. Professeur de mathématiques appliquées, Sorbonne Université, CNRS, Université de Paris, Laboratoire Jacques-Louis Lions (LJLL), Paris, France et Institut Universitaire de France.
3. Le consortium Obépine https://www.reseau-obepine.fr. est composé de Isabelle Bertrand et Christophe Gantzer (Laboratoire de chimie physique et microbiologie pour les matériaux et l’environnement, LCPME, UMR 7564 CNRS-Université de Lorraine, Nancy, France), Mickael Boni (Institut de recherche biomédicale des armées, Direction scientifique et technique, moyens expérimentaux partagés, Brétigny-sur-Orge, France), Soizick Le Guyader (Ifremer Nantes, France), Yvon Maday2,3, Vincent Maréchal1,, Jean-Marie Mouchel (Sorbonne Université, CNRS, EPHE, UMR 7619 Metis, Paris, France, e-LTER Zone Atelier Seine), Laurent Moulin et Sébastien Wurtzer (Laboratoire R&D Eau de Paris, France).

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