ANALYSE D'ARTICLE

Cancer du poumon et exposition au radon dans les lieux de vie en Chine : méta-analyse des études menées entre 2000 et 2020

De nombreuses études épidémiologiques montrent l’association entre les expositions au radon, gaz radioactif naturellement présent dans les sols, qui pénètre et se concentre dans les bâtiments, et la mortalité par cancer du poumon. Afin de déterminer l’impact sanitaire des expositions au radon dans l’air intérieur pour la population chinoise, une méta-analyse des travaux internationaux les plus récents a été conduite.

Le cancer du poumon est le cancer le plus incident et le plus mortel en Chine. Le tabagisme et l’exposition au radon ont été identifiés comme les deux causes principales. Des politiques de lutte contre le tabagisme étant en place en Chine, la contribution des expositions au radon au cancer du poumon est donc possiblement en augmentation. De plus, et toujours en Chine, les concentrations dans les logements, les écoles et les espaces de bureau sont en moyenne plus élevées sur la période 2000-2020 par rapport aux années 1980 et 1990 [1]. Dans l’objectif de quantifier l’impact sanitaire des expositions au radon dans les lieux de vie pour la population chinoise, Su et al. ont réalisé une méta-analyse des études épidémiologiques menées après 2000 sur les expositions au radon et le cancer du poumon. Initialement restreinte aux travaux chinois, la méta-analyse a été étendue à l’international.

L’inventaire bibliographique a été mené avec des moteurs de recherche en langue anglaise (Web of Science, ScienceDirect) ou chinoise (WanFang, CNKI) et a ciblé les articles publiés entre janvier 2000 et décembre 2020 rapportant des odds ratios ou des risques relatifs avec leurs intervalles de confiance à 95 %. L’échelle de Newcastle-Ottawa a été utilisée pour évaluer la qualité des études recensées. L’hétérogénéité des études a été évaluée avec le test Q de Cochrane et l’indicateur I². Des analyses en sous-groupes ont été réalisées, d’une part en fonction des classes de concentration des études (faible [< 150 Bq/m3] ou élevée), et d’autre part, selon la zone géographique de l’étude : en Chine ou dans un autre pays. Une analyse de sensibilité avec la méthode du « leave-one-out » a été conduite, c’est-à-dire que la méta-analyse a été reproduite avec toutes les études considérées sauf une ; et ce, autant de fois qu’il y a d’études incluses. Enfin, le biais de publication a été examiné avec la méthode du « funnel plot » : la représentation de l’erreur standard de chaque étude incluse dans la méta-analyse en fonction de sa taille normalisée doit représenter un entonnoir inversé pour confirmer l’absence de biais (critère a minima n’excluant pas pour autant tout biais de publication).

Les auteurs ont recensé 1 048 articles traitant du radon dans l’air intérieur et de ses effets sur la santé. La plupart ont été exclus car il ne s’agissait pas d’étude épidémiologique. Parmi les 77 restants, seuls huit articles ont été intégrés à la méta-analyse, les autres portant sur des expositions professionnelles ou d’autres événements de santé que le cancer du poumon. Ces huit articles (trois études menées en Chine, une aux États-Unis et quatre en Europe) ont été jugés de bonne qualité. Tous montraient une association positive entre les concentrations en radon dans l’air intérieur, variant de 20 à 1 190 Bq/m3, et le cancer du poumon, statistiquement significative dans six études. Une faible hétérogénéité a été observée entre les huit études, et confirmée pour les études au sein des sous-groupes. Un risque relatif (RR) de 1,01 (IC 95 % : 1,01-1,02) pour un incrément de 10 Bq/m3 de la concentration intérieure en radon a été calculé par les auteurs. Ce RR va être utilisé pour évaluer le nombre de cancers du poumon attribuables au radon en Chine dans le cadre du calcul du fardeau des maladies liées à la pollution de l’air intérieur en cours dans ce pays.

 

Commentaire

Cette méta-analyse respecte la méthode et les critères usuels de qualité des méta-analyses. Elle conforte la relation statistiquement significative entre exposition au radon et cancer du poumon, qui n’est plus à démontrer, et trouve un risque relatif du même ordre de grandeur que celui utilisé en France pour calculer la part des décès par cancer du poumon attribuable aux expositions au radon dans l’air intérieur [2]. Cette méta-analyse n’inclut pas la prise en compte du tabagisme, si ce n’est dans la mention des limites de l’étude.

 

Références

1. Su C, Pan M, Zhang Y, et al. Indoor exposure levels of radon in dwellings, schools, and offices in China from 2000 to 2020: A systematic review. Indoor Air 2022 ; 32 : 12920.

2. Ajrouche R, Roudier C, Cléro E, et al. Quantitative health impact of indoor radon in France. Radiat Environ Biophys 2018 ; 57 : 205-14.

 

Publication analysée :
Su C, Pan M, Liu N, et al. Lung cancer as adverse health effect by indoor radon exposure in China from 2000 to 2020: A systematic review and meta‑analysis. Indoor Air 2022 ; 32 : 13154

Corinne Mandin